L’invention du mois – mars 2025

La newsletter analyse le contenu d’un brevet, mais ne se prononce pas sur l'aptitude à l'emploi ou sur l'admissibilité de l’invention. Comment opérons-nous la sélection des articles ? Chaque mois, nous passons en revue, pour un certain nombre de classes de la CIB (Classification internationale des brevets) où apparaissent régulièrement des brevets liés à la construction, les publications dont l'inventeur ou le demandeur est belge. La liste ainsi établie est ensuite affinée en fonction de l’objet (sanitaires, menuiserie, gros œuvre, etc.) et du type de demandeur (PME, grande entreprise, inventeur particulier), dans une perspective de variété suffisante. 


La publication ‘L'invention du mois’ a pour objectif de familiariser le secteur de la construction avec les brevets et de démontrer que cette forme de protection ne doit pas nécessairement concerner des produits complexes. Les articles qui y sont repris peuvent également inspirer des entreprises qui cherchent à innover. Les lecteurs souhaitant proposer d'autres brevets peuvent assurément prendre contact avec l’OCBC. 

Les classifications de la CIB laissent déjà supposer qu'il n’est pas question ici d'un brevet traditionnel du secteur de la construction. Les chiffres de l’Office européen des brevets pour 2024 font cependant apparaître une forte hausse de la technologie informatique, dont relèvent les inventions mises en œuvre par ordinateur (IMO) et l’intelligence artificielle (IA). Il est donc temps d'élargir notre horizon ! La publication de brevet ci-dessus nous en a d'ailleurs livré un exemple.

Les toilettes et les visites aux toilettes semblent aller de soi, mais rien n’est moins vrai. En 2003, le Professeur Clara Greed a consacré un ouvrage au sujet, intitulé ‘Inclusive Urban Design: public toilets’, une brique de 380 pages préfacée par la World Toilet Organization (WTO). 

Le livre examine notamment un problème bien connu de tous, celui des toilettes pour dames, dont les temps d'attente sont souvent plus longs que celles pour hommes. Si les toilettes neutres ou non genrées peuvent résoudre partiellement ce problème, la combinaison d'urinoirs et de cabinets de toilettes constitue une solution bien plus efficace. En effet, on sait que lors d'une visite au petit coin, la durée d’utilisation d'un urinoir est plus courte que celle d'un cabinet de toilettes. L'invention ci-dessous a pour objectif de rendre ce processus plus efficient, plus précisément en ‘incitant’ les utilisateurs à utiliser davantage les urinoirs, à éviter les toilettes vides et à veiller à une occupation suffisante de tous les cabinets. 

L’invention concerne un procédé visant à réguler l’accessibilité des toilettes (cabinets de toilettes et urinoirs) à l'aide d'un système de contrôle de leur état d'occupation, dans une perspective d’optimisation de l'utilisation des toilettes à l’aide d'un stimulant visuel. L'invention doit permettre de réduire les files d'attente grâce à diverses combinaisons de cabinet(s) de toilettes et d’urinoir(s). En principe, cette invention pourrait également être appliquée dans d'autres domaines, comme les cabines de piscines, les places de stationnement de parkings ou les places assises de tribunes.

L'aspect intéressant de cette invention tient à son objectif d’influencer le comportement humain à l'aide d'un stimulant visuel et par l’observation de différentes combinaisons possibles de cabinets de toilettes et d'urinoirs. La visée finale consiste à optimaliser l'utilisation des toilettes, par exemple en misant au maximum sur les urinoirs lors de périodes où les cabinets de toilettes disponibles s'avèrent trop peu nombreux. 

Sachant que de nombreuses personnes, en période d'affluence croissante, sont moins enclines à utiliser les urinoirs, ce procédé consisterait à ‘inciter’ ce public à assurer une occupation optimale des cabinets de toilettes et des urinoirs disponibles. Un exemple actuel d’‘incitation passive’ que l’on observe déjà régulièrement dans les toilettes est l’application d'une image de mouche dans les urinoirs. L’invention actuelle mise cependant sur une motivation active et sélective au travers d'un stimulus visuel généré de manière automatisée. Dans ce cas, on peut parler dès lors d'une invention mise en œuvre par ordinateur (IMO), où une unité de contrôle collecte des données traitées à travers des algorithmes sous-jacents pour piloter ensuite l’utilisation des toilettes (soit l’effet technique). 

L’article 52.2 de la Convention sur le brevet européen ne livre pas de définition positive de ce que l’on entend précisément par « invention brevetable ». En effet, les brevets peuvent être octroyés dans tous les domaines de la technologie. En revanche, on trouve bien un certain nombre de définitions négatives de matières ne pouvant pas être considérées comme des inventions. On pense par exemple aux présentations d'informations (le stimulant visuel), aux règles dans le domaine des activités économiques (le business model) ou dans le programme d'ordinateur (le logiciel) qui, sur la base de la surveillance assurée et de la configuration des toilettes, doit prendre une décision concernant l'accessibilité des toilettes et l’activation du stimulant visuel. Alors que, pris indépendamment, les trois aspects susmentionnés ne peuvent pas être considérés comme une invention technique, ils peuvent bien être vus comme tels s'ils sont combinés, comme le laisse apparaître clairement la description ci-avant. 

On peut se demander comment de telles inventions mises en œuvre par ordinateur peuvent se retrouver dans la base de données des brevets. À cet égard, plusieurs classifications IPC/CPC entrent en ligne de compte, présentées dans le tableau ci-après. Cette liste n'est cependant pas exhaustive : d'autres classifications peuvent également s'avérer pertinentes, même lorsqu’elles ne font pas référence directement à des applications dans le secteur de la construction ou les IMO.